Such a conventional party [Andrew Crane]

**Dolores Strudge** Mer 10 Juin - 4:30

Quelle soirée ennuyeuse... Encore un de ces diners où se réunissaient bon nombre des Sangs Bleus de Londres, pour parler et faire parler d'eux, dans cette salle où trainaient dit-on les oreilles et les yeux de sa Majesté la Reine Victoria. Après tout, elle-même était là pour ça, pour se faire connaitre. Par obligation certes, mais c'était un mal nécessaire. Il fallait bien que ses œuvres acquièrent une quelconque valeur aux yeux des grands de ce monde si elle voulait pouvoir vivre de son Art et conserver son mécénat. Au moins savait-elle se vendre à merveille, et pouvait parler de ses œuvres avec passion pendant des heures, au fi de toute politesse bien souvent, tant elle ne supportait pas entendre les autres discuter du quotidien insipide de leurs vies bien rangées... ou de celui du voisin et des rumeurs des frasques de son épouse.

Ce soir, il n'y avait semblait-il aucun proche de la Reine pour prêter écoute aux rumeurs ou aux requêtes que certains visages déçus avaient espéré manifester. Dolores quand à elle s'en contrefichait royalement, si l'on puis dire, elle aurait sûrement bien d'autres occasions de faire connaitre son nom et ses œuvres auprès de la Reine. Elle avait profité du diner pour en toucher quelques mots à sa voisine de table, qui s'était par malheur avérée plus bavarde qu'elle. On eut dit une vraie pie, on ne l'arrêtait plus. Aussi Dolores préféra se concentrer sur le repas, faisant mine de l'écouter d'une oreille distraite, tout en espérant qu'elle-même trouverait des personnes prêtes à l'entendre faire l'éloge de ses œuvres durant la soirée.

Le repas terminé, les convives s'étaient levés pour investir la salle en se rassemblant par petits groupes, pour parler de tout et de rien. Dolores allait de l'un à l'autre, échangeant des politesses, cherchant la conversation où elle pourrait s'immiscer, se mettre en valeur. Elle naviguait ainsi, au milieu de tous ces Nobles, bien à son aise dans une robe vert émeraude qui valorisait son œil gauche, marquant nettement la différence avec le droit, plus foncé. Ses yeux qui se posaient sur l'un ou l'autre, comme pour juger avant l'approche.

Son regard double croisa celui de cet homme à la peau d'albâtre, s'y arrêta un instant. Un instant seulement, l'homme étant déjà en charmante compagnie. Elle hésita à s'imposer là, à s'intégrer à leur conversation pour la détourner à son avantage. Quelques secondes d'hésitation suffisantes pour qu'il la remarque sans doute, avant qu'elle ne se décide vraiment à avancer vers eux, glissant un "Bonsoir." de convenance, prétexte à écouter leur sujet de discussion et d'y prendre part.

**Andrew Crane** Mer 10 Juin - 20:03

Ballets incessants, défilés de gens. Derrière ces bavardages insipides, ces grotesques parades, l’on jugeait et l’on était jugé. Les masques se succédaient, se déclinant en toutes sortes de gens. Un rire cristallin, un sourire discret, un hochement de figure constituaient les armes de ces nobles endimanchés, signes de leurs plus basses mesquineries.
Dans cet univers de faste et de paillettes, où tout était faux et rien n’était vrai, les aspects possibles et inimaginables de l’hypocrisie et de la bêtise humaine se déroulaient. Néanmoins, un lien supportait les invités attablés à savoir le sang. Leur naissance était un gage de qualité ; ces lords et ces ladies avaient beau se trouver des tares et racontaient les plus odieux mensonges sur leurs confrères et d’autres lignées, ils étaient à part, hors de ce monde vulgaire et commun, hors de cette foule pouilleuse, de cette plèbe dégoûtante.

Mais lui, n’était-il pas différent ? Sa silhouette caractéristique se découpait de la populace locale. A sa tenue, nul doute qu’il s’agissait d’un rigoriste et de l’un de ses austères ecclésiastiques, pourtant ses traits juvéniles, sa coiffure hirsute, n’étaient-ils pas tout autant des gages d’un esprit plus ouvert ? Les paroles de l’homme se faisaient rares, mais pourtant lorsqu’il s’animait, il montrait l’une de ces farouches volontés qu’il est difficile de faire plier.
C’était l’un de ses hommes qui cherchent à faire avancer la société mais qui ont trop de pudeur pour en parler. L’on disait de lui qu’il était inspecteur…Petite noblesse oblige, mais beau garçon. Son succès auprès des coquettes fut d’ailleurs notable mais sa maladresse et sa froideur légendaires.
Il toisa avec sublime une innocente naïve, sûrement trop accaparé par l’une des discussions avec ses homologues « mâles ». Une pimbêche s’invita vers sa personne par surprise, il manqua de renverser son verre sur sa robe, enfin une dernière osa chercher à lui plaire en discutant de Londres et des bruits étranges qui courraient. Toutes ces sornettes ne furent du goût du garçon qui commença à lui répliquer sèchement qu’elle ne devait prêter oreille à ses calomnies. Ce manque de fantaisie déplut… C’est alors que l’artiste apparut. Drapée de sa robe émeraude, l’inspirée s’était envolée avec grâce jusqu’à sa personne et le salua d’un sobre « Bonjour ».
Mais déjà, Lord Hasting s’avançait pour s’emparer de la menotte de la belle pour lui faire le baise main et de s’exclamer de plus belle…

« Enchanté mademoiselle. Vous êtes bien la plus belle des fleurs de ce jardin ! »

Un sourcil se suréleva sur la figure de l’enquêteur, la statue d’albâtre demeura figée ; ses prunelles sombres dardèrent à l’encontre de Dolorès comme pour vérifier les dires de ce fort gentilhomme… Un soupir se fit entendre alors que les yeux vifs et noirs fusèrent finalement sur le lord, jugeant son salut peu convenable.

« Allons…mon garçon, ne direz vous bonjour à cette enfant ? »

On le sortit donc de son songe d’observation et visiblement surpris, il répéta à la hâte…

« Si…si…Bonjour mademoiselle. »

« Je suis le lord Hasting. Ici monsieur Crane et à qui avons-nous l’honneur … ? »

**Dolores Strudge** Ven 12 Juin - 6:22

Lord Hasting était certainement un parfait gentilhomme, une autre qu'elle se serait empourprée, aurait osé un gloussement insipide, devant son attitude chevaleresque et le compliment qui l'accompagnait. Dolores en resta de marbre, le regardant froidement de ses yeux contrastés. Elle exécrait particulièrement ces élans de courtoisie si communs lors de soirées comme celle-ci. Malgré toute la répulsion que le Lord lui inspirait en cet instant, son visage demeura neutre. Elle n'avait pas pour habitude d'épancher ses sentiments comme pouvaient le faire nombre de femmes mièvres peuplant la Haute Société londonienne. Elle se permit tout de même un sourire lorsque le Lord courtois rappela à l'ordre le jeune homme qui l'accompagnait. Lui non plus semblait ne pas particulièrement apprécier les convenances.

Monsieur Crane... N'était-il pas inspecteur ? Elle prêtait rarement attention aux papotages ennuyeux qui animaient ces soirées, mais elle avait déjà eu l'occasion d'entendre parler de lui, et de ses méthodes soi-disant avant-gardistes, au cours de l'une d'elles. Il y aurait peut-être là matière à discussion plus intéressante que les imbécilités mondaines habituelles. Et puis, au delà des colportages, l'homme en lui-même l'attirait. On eut dit une statue, une de ces statues de plâtre, fragiles, qui servaient à réaliser les bronzes. Elle se prit à l'imaginer changé en bronze, de statue d'albâtre devenir statue d'airain. Il n'en serait que plus beau, mais perdrait cette fragilité qui semblait le caractériser. Ce qui serait fort dommage...

Le regard de Lord Hasting se fit insistant, voyant la jeune femme détailler Andrew sans même avoir eu la décence de se présenter quand il le lui avait poliment demandé. Sa voix cristalline se fit enfin entendre, dans un murmure qui ne la rendait pas moins claire.

"Je suis Miss Strudge, Artiste sculptrice. Vous avez probablement déjà entendu parler de mes œuvres..."

Incorrigible orgueil, qui reprenait le dessus sitôt son nom prononcé. Et quand bien même la question venait du Lord, c'est à Andrew qu'elle s'était adressée. À l'idée de s'entretenir avec lui au sujet de ses créations, ses yeux paraissaient avoir gagné en éclat.

**Andrew Crane** Ven 12 Juin - 20:54

L’intérêt vif qui s’éveilla en l’artiste fut-il partagé ? La statue d’albâtre l’avait dévisagé cherchant à la sonder, à déceler les tréfonds de sa pensée, de son être, de ses perles sombres. Leurs regards se rencontrèrent pour mieux se fuir. N’était-il pas de ses êtres détestables, orgueilleux au possible qui ont une opinion importante d’eux-mêmes ? Malgré sa fierté virile, l’homme en demeurait fragile. Un bois différent l’habitait et le rendait irréel. A peine, le marbre de sa peau allait-il s’animer que Lord Hasting s’exclama dans un enthousiasme avenant, souci ardant de satisfaire aux exigences de la sculptrice.

« Bien entendu, très chère ! Parlez moi donc de vos nouveautés ! »

L’art était-il devenu mercantile ? Les œuvres s’étaient vues rabaissées au rang de vulgaires objets décoratifs, ils n’étaient plus sources d’émotions, n’apporter plus à un éclairage sur la société et n’éveiller plus les passions. Miss Strudge pourrait-elle tolérer cela ?
Un rictus s’étendit sur la figure de l’inspecteur, un sourcil s’éleva dans un mouvement protestateur et d’une voix sèche et monocorde, il s’exclama dans une arrogance folle.

« Je ne connais pas grand-chose à l’art et je doute d’avoir un goût prononcé pour ces choses, mais il me semble, monsieur, que les artistes ne peuvent être réduits à de simples vendeurs. »

Un silence pesant s’imposa sur cette déclaration purement factuelle qui avait émané de la bouche gourmande et tentante de ce Messire Crane. Provocation odieuse que voilà ! Il était donc fidèle à sa réputation, mais une raison demeurait inconnue : pourquoi cet homme passionné des sciences s’était-il dévoilé comme un farouche défenseur des arts ? Simple volonté de défi ? Un rire gêné s’extirpa des lèvres du principal intéressé qui chercha à emporter avec lui la frêle jeune femme.

« Venez, ma chère, laissons donc cet inspecteur de malheur à ses enquêtes… ! »

Attaque terrible que voilà ! Le vieux Lord Hasting s’était déjà emparé du bras de l’enfant. Mais alors qu’ils menaçaient tout deux de disparaître. De nouveaux accords se firent entendre de la part de l’ombre….

« Je ne connais grand-chose à la sculpture mais je serai aise d’apprendre… »

**Dolores Strudge** Sam 13 Juin - 8:48

Ainsi elle avait semblait-il éveillé elle aussi sa curiosité. Ses yeux la scrutaient, comme pour lire en elle, et se dérobaient à son regard s'ils avaient le malheur de se croiser. Elle aurait pourtant apprécié pouvoir imprimer ses deux émeraudes aux reflets contrastés dans ces orbes sombres, profondes. Il avait son orgueil, elle avait le sien. Ils auraient sans doute pu tous deux jouer au chat et à la souris encore longtemps, sans que l'on sache d'ailleurs qui était le chat, mais il avait fallu que le Lord Hasting les interrompe, de façon fort vulgaire.

Elle avait l'habitude de toutes les imbécilités dont pouvait être qualifié son Art, relégué bien trop souvent à un simple usage ornemental, voire à un signe extérieur de richesse, ou pire, de bon gout quand on n'en disposait d'aucun. Mais elle ne s'en souciait guère, avait appris à faire avec, afin de mieux pouvoir "se vendre", diraient certains - elle-même aurait préféré "élargir l'horizon de ses œuvres". Toutefois, la réaction de l'inspecteur la ravit. Elle avait rarement l'occasion d'entendre de si fervents propos venir défendre sa profession, qui plus est par un non-initié. Merveilleuse provocation que voila ! Quel que fut le sens de ces paroles dans la bouche d'un homme de science, elles ouvraient lieu à une discussion des plus intéressantes.

Encore fallait-il faire comprendre au Lord qui avait eu l'affront de se saisir de son bras pour l'éloigner de ce terrible inspecteur. Pensait-il pouvoir ainsi décider à sa place de ce qu'il était bon de faire et des gens à fréquenter ? Elle n'eut même pas besoin de l'invitation de Messire Crane à lui apprendre la sculpture pour se décider.

Posant sa main sur le bras du Lord Hasting pour l'arrêter, elle le remercia froidement avant de se détourner vers son si intéressant inspecteur, cherchant encore une fois à plonger ses prunelles doubles dans les yeux sombres.

"Apprenez donc, Messire Crane, que tout comme Il ne se vend pas, l'Art ne s'apprend pas, Il se vit. Mais je serais ravie de vous montrer de quelle manière le vit-on."

Plus que ses yeux, ce sont ses mains qui attirent le regard en cet instant, des mains blanches, bien soignées, qu'elle tient devant elle dans une esquisse de geste inachevé.

**Andrew Crane** Sam 13 Juin - 12:59

La curiosité est un vilain défaut ! Pauvre maladie qui s’était emparée du duo.
Les jeux de la conquête et de la découverte s’offraient à eux, tout deux sources d’insondables mystères et d’innombrables rumeurs, n’étaient-ils pas faits pour se rencontrer ? Les ingrédients avaient beau s’assembler, l’alchimie opérerait-elle ?
Leur entretien se transformerait-il dans l’une de ces joutes qui va si bien entre un membre du beau sexe et un gentleman hautain ? Si tel était le cas, nul doute que leur orgueil s’en trouverait mis à mal et de nombreuses blessures viendraient entachées leur folle fierté. Ce pêché d’arrogance n’était-il pas l’héritage involontaire de leur rang et de leur statut ?
L’inopportun envolé, ils s’étaient retrouvés. Les éclipses englobèrent les émeraudes de leur noirceur, plongeon vers les ténèbres, Andrew se plut à soutenir son regard avant de s’attarder vers ces mains fines et délicates, ces menottes précieuses, immaculées d’une blancheur lactée, rendues expertes dans le façonnement des plus bas matériaux pour en construire et en animer des œuvres d’art sublimes. Les ombrelles sombres fuirent de nouveau après cet examen bref de sa personne.
Eludant la proposition alléchante de cette plante gracieuse bercée d’une douce volupté, Messire Crane lui répliqua quelques propos convenus avant de se laisser aller à une question incongrue.

« Sur quoi travaillez vous en ce moment Miss Strudge ? Que est donc l’objet de votre inspiration ? Dites…..moi…Vous y connaissez vous en anatomie ? »

Cette dernière phrase avait franchi le seuil de ses lèvres sans crier gare, dénotant grandement avec les usages de coutume. S’empourprant légèrement de peur que cette fleur y voit là des paroles déplacées, l’enquêteur ajouta dans un empressement vif et certain, ses orbes noirs ne tardant pas à se reporter dans les yeux vairons.

« Il m’est parfois utile pour…Peu importe. Me montrerez vous vos œuvres ? Et de quelle manière vous vivez votre art ? »

Si, son discours s’était d’abord amorcé en une justification de sa demande, la statue d’albâtre chercha par la suite à verser le filtre de l’oubli dans l’esprit de Dolorès. La chance fut-elle son alliée ? Une musique se fit bientôt entendre, diablerie de cordes, les notes avaient envahi la salle. Une valse, rien de plus. Les sang bleu se trouvaient las de toutes ces conversations et de ces politesses et désiraient pour la digestion l’une de ces animations distinguées. L’enquêteur ne parut pas surpris de la tournure de la soirée et ne siffla mot. La quiétude semblait l’avoir trouvé et il était visiblement décidé à ne pas danser. Dans la salle, les couples se formaient.

**Dolores Strudge** Dim 14 Juin - 20:26

L'échange silencieux était prometteur, offrant des perspectives multiples aux yeux de l'Artiste. Elle était prête à lutter, à mener bataille contre ce mur d'orgueil qui s'élevait devant elle, faisant écho au sien. Et la victoire en serait délectable, assurément. Y gagnerait-elle le droit de façonner cet esprit cartésien, cette âme d'une rigidité et d'une logique implacables ? Peut-être lui livrerait-il plus encore... Elle ne pouvait en aucun cas se permettre de perdre. Et puisque leurs regards ainsi soutenus ne les départageaient pas, c'est donc avec les mots qu'ils allaient devoir se battre. Ce qui n'était pas pour déplaire à Dolores, même si en d'autres lieux, en d'autres circonstances, elle en serait sans conteste venue aux mains...

Et les mots vinrent, il avait l'initiative et attaqua en premier, commençant par des passes d'arme des plus classiques, auxquelles elle avait une parade toute trouvée. S'ensuivit un coup bas, vicieux, mais dangereux pour lui aussi. Il aurait probablement touché, s'il n'avait préféré esquiver, de peur de la riposte sans doute, avant de retomber dans la facilité. L'avantage des mots sur les armes, c'était que sa riposte pourrait se faire attendre, pour ensuite frapper sans prévenir lorsqu'il s'y attendrait le moins...

L'on eut voulu l'empêcher de contrattaquer que l'on ne s'y serait pas pris autrement. Elle n'avait pas eu le temps de rétorquer quoi que ce soit quand la musique s'éleva, l'arrêtant un instant dans son élan. Coupé une fois de plus la seconde d'après lorsqu'un gentleman vint lui demander une danse, avisant que Messire Crane n'était pas disposé à le faire. Demande qu'elle eut l'affront de refuser, envoyant l'importun sur les roses, pour enfin parvenir à répliquer.

"Hum... Je disais donc... Je travaille dans l'instant présent, pas dans le moment. Je n'ai pas de travaux précis en cours, je suis mon inspiration comme elle vient. Je n'ai pas pour habitude de faire visiter mon atelier mais si vous tenez à me voir vivre mon Art, vous y êtes le bienvenu."

Avait-elle réellement oublié, éludant par là-même une autre de ses questions ? Ou peut-être était-ce du au fait que son inspiration du moment était juste devant elle. Sans se soucier de ces considérations, il ne fallut pas longtemps pour qu'un Lord un peu cavalier l'invite à danser, renvoyé sans plus de manières que le premier. Se retournant alors vers son partenaire, elle ajouta.

"Ne voudriez-vous point m'inviter à danser ? Cela dissuaderait ces gentlemen de s'approcher. À moins que vous ne préfériez continuer cette charmante conversation dans un endroit plus calme..."

Un sourire appuyé vint compléter sa proposition, que les esprits mal placés auraient pu qualifier d'indécente. Peut-être fallait-il y voir là la réponse à une question oubliée...

**Andrew Crane** Lun 15 Juin - 19:18

Provocation ostentatoire, défi de pirouettes et d’arabesques ! La bataille gagnait en hauteur, leur joute convenue de palabres se verrait-elle remplacée par un jeu dangereux d’équilibriste ? Le terrain de leur affrontement prenait des allures de valse, à la vérité il n’y connaissait rien en danse. L’aveu d’une telle faute aurait été rédhibitoire et la concession de la défaite était tout bonnement hors de question. Comment se dérober à pareil devoir ?

« Je pourrai très bien me contenter du spectacle de vous voir écarter tout ces gentilshommes. »

Le marbre de ses traits semblait décidé à ne pas bouger, la moindre once de mouvement n’aurait été perceptible en cet instant. Puis d’un pas franc, il s’avança, cassant la distance qui les séparait comme pour répondre à son sourire oppressant et charmant. La suite du programme était plus compliquée, les hostilités étaient déclarées et le troublant inspecteur se trouvait démuni face à son opposante. Cherchant remède à son ignorance, ses yeux se perdirent sur la posture de ses cavaliers qui menaient la danse ; et de cette observation brève, il passa à la pratique, cherchant à reproduire ces miroirs de couple se trémoussant. L’imitation demande plus d’ingéniosité qu’il n’y parait, sinon l’on se retrouve rapidement démasqué ! Pauvre de lui qui tenta en vain à placer correctement ses mains, non de ces menottes d’artiste, mais de ces membres allongées, fières et larges. Ces paumes ouvertes, toutes deux s’entichèrent de ses flancs, l’une prit position sur une hanche délicieuse alors que l’autre plus haute avait gravi en altitude et se trouvait toute proche de l’un de ses seins. Tout occupé à sa copie, la fuyant du regard pour n’entendre moquerie, Andrew ne se rendit compte de sa maladresse. Mais perfectionniste dans l’âme, il parvint à sa corriger et bientôt l’austère avait la plus parfaite des allures, pareille à celle de ses semblables. Bien entendu, l’austère avait des notions, mais il n’avait jugé bon de les retenir, si bien qu’ils débutèrent dans une cacophonie de pas cette valse. Un coup, l’artiste trouva l’écho de son torse, puis la voilà qu’elle s’éloignait, mais dans cette harmonie dissonante, ce ballet décalé, ils formaient à eux deux le couple le plus élégant de la soirée. Concentré sur ses pas, il fit preuve d’efforts de patience pour ne pas la quitter sur cette vaste scène, et l’aurait-il fait s’ils ne s’étaient retrouvés qu’à deux. N’était-il en cet instant entre ses mains, ne pouvait-elle pas le façonner ici et maintenant ? Un teint de rose vint se coller à l’albâtre, une peinture légère que seul un œil d’expert aurait pu percevoir. Et bientôt, il entreprit d’allier la conversation à la danse pour lui montrer qu’il n’était pas complètement désarçonné. Dans un sourire de défi, le lion déclara bientôt.

« Je serai ravi de faire parti de l’un de ses privilégiés, Miss Strudge. »

Réplique assassine pour voir jusqu’où la demoiselle oserait aller ? Il poursuivit, bien décidé à entrevoir une expression de surprise prendre possession de ses traits, fixant une date pour sa visite.

« Peut-être pourrai-je passer dans quelques jours pour vous voir travailler ? Vous pourrez également me montrer vos œuvres et me faire ressentir un peu de votre Art ? »

Déjà, l’homme se réjouissait qu’elle se démonte et que cette farouche amazone recule de deux pas, lui offrant une quelconque excuse pour lui refuser sa venue. Car, une chose était certaine, il n’y mettrait pas un pied, foi de Monsieur Crane !

**Dolores Strudge** Ven 19 Juin - 7:05

L'affrontement prenait une tournure des plus intéressantes. Il s'était enfin décidé à répondre à l'une de ses attentes, et c'était déjà là une première victoire. Il avait beau avoir tenté de placer une pique bien sentie, il n'en avait pas moins cédé. Et Dolores conservait l'avantage, assurément, devant les maladresses de son cavalier. Loin d'en être gênée, elle se contenta d'un sourire amusé en offrant ses flancs à ces larges mains, pas le moins du monde troublée par la position tendancieuse de l'une d'elles. Les mains de l'Artiste vinrent trouver les épaules de l'inspecteur, en prirent possession, s'en firent les moules véritables en venant ainsi s'imprimer sur le tissu, comme si ce qu'elles touchaient n'existait qu'à travers elles. Dolores commençait déjà à le façonner, à le rendre sien.

C'était bien là l'unique raison pour laquelle elle aimait danser : le contact, la proximité avec le partenaire. Autrement quel intérêt y avait-il à pavaner, à exposer à ces messieurs-dames son "talent" à poser un pied derrière l'autre suivant une norme préétablie ? Pour elle, la danse était un Art, que l'on devait pouvoir laisser s'exprimer librement, mais qui était bien trop souvent enfermé dans des carcans, des traditions vieillottes. En soi, comme beaucoup d'autres formes d'Art... Et pour la beauté de l'Art, la qualité de l'œuvre, Dolores ne se laissait pas aller à danser avec n'importe qui. Elle choisissait avec soin ceux - ou celles - qui méritaient qu'elle daigne apposer ses mains sur eux, pour en mouler les contours, les formes.

Et Messire Crane était de ceux-là. Et quand bien même leurs premiers pas pouvaient sembler cacophoniques, elle ne s'en réjouit que plus. Si l'homme avait oublié ses leçons de danse, il n'en serait que plus malléable. Aussi l'Artiste s'adapta-t-elle aux mouvements désordonnés de son cavalier, nullement troublée par les variations imposées. Et si elle le laissait s'inspirer de ses voisins, c'était pour mieux guider ses pas à son insu. Et le ballet fut charmant, répondant pleinement à ses attentes, même si elle en espérait davantage que la légère pointe de rose apparaissant sur les joues blanches qui lui faisaient face. Mais ses espoirs allaient peut-être être comblés, puisque la conversation s'installait à nouveau, au gré de leurs pas.

Seul un sourire charmeur vint à nouveau perturber ses traits alors que sa réponse ne se fit pas attendre.

"Très bien, dans ce cas, vous y êtes le bienvenu. Venez donc quand bon vous semblera, vous m'y trouverez sûrement, j'y passe le plus clair de mon temps. Et je me ferai un plaisir de vous initier à mon Art..."

Ses yeux vinrent plonger dans ceux de Messire Crane, faisant écho à son invitation. L'initier, oui... Dolores n'était pas de ces Dames si facilement effarouchées, elle osait, et était loin d'avoir montré tout ce dont elle était capable afin d'obtenir ce qu'elle voulait. Pourrait-il encore refuser une si séduisante proposition ?

**Andrew Crane** Sam 20 Juin - 15:38

On se pavane, on se charme, une danse en entraîne une autre. Comme il est difficile de briser la proximité de deux corps, l’intimité naissante, troublante. L’émeraude avait mis la main sur son pantin, tout accaparé par les mouvements des pas, il avait consenti à ses volontés. Captif de ses fils, les liens s’étaient écoulés le long de ses membres, véritables articulations à même sa chair, la toile arachnéenne s’était répandue et il s’était habillé du costume de Pinocchio. C’étaient ces mains, ces ailes de colombe, ces preneuses d’otage qui tranchaient le plus avec l’inspecteur Crane. La description de ses doigts sur le tissu noir rendait hommage à la créatrice, notes de pureté sur ce costume, il était son instrument.
Cherchant à la pousser à bout, l’austère aurait cru la désarçonner, il en fut tout autrement. La danseuse renouvela sa proposition avec plus d’affirmation et de conviction. Miss Studge qui désira obtenir de la couleur, fut sûrement ravie d’obtenir l’effet indiqué, le rouge barbouilla ses joues dans une fraîcheur certaine et non par grosses touches. La voilà peintre aussi ! Ne savait-elle pas qu’il ne faut point trop secouer les âmes fragiles de peur de les voir fuir ? S’il consentit à lui offrir un « Oui, je viendrai assurément… » ; Mais en son fort intérieur, sa décision était déjà prise et elle était à l’opposée de ces mots ! Il fallait la quitter maintenant ou se perdre avec elle dans les méandres inconscients d’une danse. Piquante, la sculptrice mettait à mal son orgueil, et pour éviter la confrontation de propos, il lui préféra la fuite, c’était une alternative bien plus sûre !
Enfin, la musique se termina.

« Il est temps que je vous libère, je fais un piètre cavalier et vous seriez méchante de ne pas répondre aux attentes de ces gentlemen. »

Céderait-elle à son caprice ou en formulerait-elle un nouveau, à savoir la poursuite éternelle de cette danse ? Lui imposerait-elle la découverte d’autres ballets ? Les mains de l’inspecteur ne s’étaient séparées de cette taille gracile et fine, attendant peut-être qu’elle lui dicte un mot.

« Ca a été un plaisir de vous rencontrer, Miss Strudge. Veuillez m’excuser… »

**Dolores Strudge** Mar 23 Juin - 10:58

La victoire avait été sienne sitôt ses mains posées sur lui. Elle le guidait, et tant que la danse durait, elle le possédait, il était entièrement à sa merci. Aussi n'était-elle pas prête de le lâcher, d'autant plus quand l'homme se peignit de rouge. Adorables touches vermeilles au milieu de cette blancheur ! Elle eut volontiers croqué ces joues-là. Elle lui offrit un nouveau sourire en retour à sa réponse positive, continuant à l'entrainer dans la danse.

Mais tout avait une fin, les instrument finirent par s'arrêter de jouer, au grand regret de Dolores. Et s'il ne l'avait pas encore lâchée, attestant par là même le pouvoir qu'elle exerçait sur lui, il était évident qu'il cherchait la fuite. Elle n'était pas du genre à s'embarrasser des convenances, mais elle n'avait pas l'intention d'aller contre sa volonté. Mieux valait le laisser croire encore libre de ses mouvements pour éviter de l'effrayer et de le braquer définitivement. Si elle le laissait partir, il reviendrait, à n'en pas douter, et elle saurait retrouver facilement sa domination sur lui la prochaine fois.

"Vous vous sous-estimez, Messire Crane. Vous valez bien mieux que ces gentlemen, et vous apprenez vite."

Elle s'éloigna d'un petit pas, libérant enfin les mains de l'inspecteur de ses hanches, qu'elles effleuraient encore du bout de ces doigts longs et fins.

"Je ne vais pas vous retenir plus longtemps, j'allais moi-même me retirer. Sachez que le plaisir était partagé."

Elle ne le retenait pas, ni ne souhaitait lui imposer quoi que ce soit, du moins dans l'immédiat. Mais en bon gentleman qu'il était, il daignerait bien la raccompagner... N'est-ce pas ?

**Andrew Crane** Ven 26 Juin - 15:26

Sa volonté de retraite ne tomba pas dans les oreilles d’une sourde. Réplique imminente, la sculptrice s’accorda sur son tempo, la danse se poursuivait ainsi que leur joute. Etait-ce seulement une passe d’armes ?! Non, leur entrevue prenait des allures de bataille rangée, d’une guerre sans merci entre membres de sexe opposé ! Si l’intérêt et la curiosité s’en trouvaient, tout deux, renforcés, ce conflit les exposait à bien des dangers.
Ses lèvres se plissèrent avec suffisance dans un simulacre de sourire, son œil se faisait noir alors que Miss Strudge annonçait tout également son départ imminent. Lisait-elle dans ses pensées ? Dolores coupait court à sa tactique, lui imposant son jeu. Ce n’est qu’après un long moment et de mauvaise grâce qu’il lui concéda un…

« Puis-je vous raccompagner Miss Strudge ? »

Etre sensible à pareille femme semblait lui être désagréable, lui céder même d’un pouce lui paraissait intolérable. Les paroles issues des convenances furent sans doute une traduction erronée de ses pensées qui auraient sifflé un cinglant : « Dois-je vous raccompagner Miss Strudge ? ».
Son bras lui prêta assistance, nouvelle parade où elle put juger de l’état de sa personne, reprise de leur représentation, du spectacle offert à des yeux trop voyeurs. Ils quittèrent la réception sous le flot des rumeurs et le silence des regards. Le contraste de l’ambiance dorée et de l’extérieur frappa de plein fouet le couple, la morsure du froid s’imposait, lui n’en parut pas plus affecté, après tout, n’était-il pas l’un de ces rigoristes ? Un homme de glace ? Alors que l’austère s’apprêtait à la raccompagner en dehors de la bâtisse, l’Ariane, la volatile lui souffla le véritable chemin. Andrew s’en étonna…

« Ainsi, vous habitez ici ?! »

Cette surprise marquée par une vive exclamation résonna dans la petite cour où ils se trouvaient tout deux. Ils traversèrent celle-ci d’une traite. Leur escapade se poursuivit encore quelque peu dans une succession de couloirs. Leur marche se stoppa lors de l’arrivée jusqu’aux appartements de Dolores.
Dans leur séparation, dernier écho de leur lutte, les mains s’apprécièrent, se caressèrent avant de se rompre.

« Bonne nuit, Miss Strudge…Passez une bonne soirée. »

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